Editorial: Tunis, capitale de la danse 2017

Le Festival « Tunis, capitale de la danse » poursuit pour sa seizième année son ambition, celle de donner à voir au public le plus large la vitalité de la scène artistique. Alors que les éditions précédentes s’étaient concentrées sur des compagnies internationales, nous avons fait le choix de présenter cette année un large panorama des danseurs et chorégraphes tunisiens, rassemblant des générations, des approches artistiques ou encore des formes d’expression d'une grande diversité.

Durant cinq jours, plus de 20 spectacles seront ainsi proposés. Certains ont déjà tourné à travers la Tunisie ou à l’international. D’autres sont encore en période de création. C’est toute l’idée de la plate-forme : donner à voir la création tunisienne, sans hiérarchie, mais dans son état le plus spontané et sincère. Provoquer, autour de l'acte créateur, la rencontre entre les générations de danseurs et de chorégraphes.

En Tunisie, depuis plus de 30 ans, la danse tend progressivement à se faire une place dans le paysage institutionnel. Je tiens à saluer l’engagement du Ministère des affaires culturelles qui accompagne avec constance notre discipline et notre festival. Nous le savons, les moyens manquent pour structurer et consolider la danse tunisienne. Les partenaires financiers et les médias qui sont à nos côtés nous permettent d’exister dans une économie fragile mais chacun doit comprendre de l’importance de la danse dans notre société.

En tant que spectacle, la danse relève tout autant du loisir que de la représentation symbolique. Lorsque les lumières de la salle s’éteignent, le spectateur est invité à un étrange voyage, fait d'autres images, d'autres langages. Apparaît progressivement la possibilité de cet Ailleurs que Tchekhov appelait de ses vœux : "il faut représenter le monde non tel qu'il est, ni tel qu'il doit être. Mais tel qu'il apparaît en rêve."

Les voyages chorégraphiques qui vous sont proposés lors de cette édition poseront la question des frontières : celles de l’histoire, des traditions, du genre, de l’âge, du temps. Les artistes expriment avec leur sensibilité l’accélération et les mutations de notre société dont ils sont au diapason. La jeunesse concentre en elle-même le vertige de l’inconnu, de ces repères devenus si fugaces.

L’art rend l’impossible tangible. Impuissant à apporter des réponses, il contribue néanmoins à poser des diagnostics. Et il y en a un qui transcende les clivages : c’est celui du désir de liberté. La liberté de conscience. La liberté du corps, la liberté d’aller et venir. La liberté d’aimer. Mais la liberté ne s’apprivoise pas facilement car elle est lourde de responsabilités. Car elle rend autonome et impose de ne jamais se satisfaire de quelconques acquis.

À l'image de nos artistes, notre jeunesse est fragile et exigeante : elle a soif de cette liberté, elle veut légitimement construire un futur qui lui ressemble. Un futur désirable et plein d’espoirs. Nous avons en commun cette fragilité, nous partageons cette exigence artistique.